Le Pays de Caux, dans le département de la Seine-Maritime, s’étend de Sainte-Adresse au sud-ouest jusqu’à l’approche picarde au nord-est, au Tréport. Sa richesse paysagère s’étire sur 130 km de côtes, connus sous l’appellation « Côte d’Albâtre », dont le motif emblématique est un linéaire de falaises crayeuses. Ces dernières sont entaillées par des dépressions propres au Pays de Caux : les valleuses, accès naturels ou aménagés à la Manche, espaces naturels d’une grande qualité écologique. L’arrière-pays cauchois est également traversé et structuré par 11 fleuves côtiers (la Valmont, la Durdent, la Veule, le Dun, la Sâane, la Scie, l’Arques, l’Yères, l’Eaulne, la Bresle et la Béthune), qui ont dessiné une alternance singulière de reliefs et de séquences végétales, avec la Manche comme horizon. Sur le plateau, se déploient des paysages tabulaires et ouverts, marqués par l’openfield de l’agriculture intensive, de plus en plus marqués par l’étalement urbain pavillonnaire. Dans les vallées littorales, ce sont des paysages en creux, bénéficiant du boisement de leurs coteaux, qui offrent des atmosphères plus intimes. Leur valorisation par une agriculture mixte (maraîchage, horticulture) et la présence d’un bâti hérité du XIXe siècle (villas résidentielles, équipements liés à la culture du lin, moulins) ont créé comme des huis clos en contrebas du plateau.
« Rien de gentil comme cette plage (Étretat) le matin à l’heure de bains. Elle est petite, arrondie en fer à cheval, encadrée par ces hautes falaises blanches percées de trous singuliers qu’on nomme les Portes, l’une allongeant dans la mer a jambe de géante, l’autre en face, accroupie et ronde ; la foule des femmes se rassemble, se masse sur l’étroite langue des galets qu’elle couvre d’un éclatant jardin de toilettes claire, dans ce cadre de hauts rochers. Le soleil tombe en plein sur les côtes, sur les ombrelles de toute nuances, sur la mer d’un bleu verdâtre ; et tout cela est gai et charmant, sourit aux yeux. On va s’assoir tout contre l’eau et on regarde les baigneuses. Elles descendent, drapées dans un peignoir de flanelle qu’elles rejettent d’un joli mouvement en atteignant la frange d’écume des courtes vagues ; et elles entrent dans la mer, d’un petit pas rapide qu’arrête parfois un frisson de froid délicieux, une courte suffocation »
Forte de son héritage de station balnéaire, Dieppe présentait dès 1965 une forte densité urbaine, qui est allée en s’accroissant sur sa côte et dans sa vallée. L’accélération et l’extension du phénomène d’urbanisation a aussi concerné les vallées de la Scie, du Dun et de la Saane, au sein d’un territoire parcellaire et agricole. En réponse à ces évolutions, l’action du Conservatoire du littoral s’est renforcée sur le littoral du territoire cauchois (vallée de la Duredent, Saint-Léger-Hameau, vallée du Dun, vallée de la Sâane, cap d’Ailly, bois de Bernouville, vallée de la scie), notamment dans le but de préserver des respirations naturelles entre les bourgs côtiers.
- une côte déroulée sur 130 km de falaises crayeuses, entaillées par valleuses et des villes portuaires et balnéaires, dont une partie classée « Natura » 2000
- une histoire littorale marquée par l’apparition des premières stations balnéaires dès 1824 (Étretat, Fécamp, Dieppe)
- un cadre paysager rythmé par l’alternance d’espaces naturels et de milieux en phase d’expansion urbaine, et la présence de valleuses, dépressions typiques du Pays de Caux
- impact visuel et écologique important des centrales de Paluel et de Penly, du terminal pétrolier d’Antifer et d’ouvrages hydrauliques aux embouchures des fleuves ; présence d’un parc éolien à Saint-Léger-Hameau
- un littoral marqué par l’attractivité de ses stations balnéaires, avec un risque d’expansion urbaine et de standardisation de la côte comme de l’arrière-pays en raison du mitage pavillonnaire, au détriment des respirations naturelles entre les villages
- une série de sites classés ou inscrits (vallée de Bruneval, Antifer, Vaucottes, Yport) et une labellisation « Grand Site de France » en cours à Étretat, en cours de labellisation
Emmanuel TAILLARD, « Le grand paysage du littoral de la Côte d’Albâtre, de la reconnaissance au projet », Conservatoire du littoral, 2016