Comprise entre le Petit Rhône à l’ouest, le golfe de Fos à l’est et la Méditerranée au sud, la Camargue est une terre horizontale soumise aux actions conjuguées du vent, de l’eau et du sel, valorisée depuis l’Antiquité. Elle forme une vaste mosaïque paysagère d’étangs, de marais, de salines, d’exploitations agricoles et d’activités touristiques ou industrielles, traversée par une plage de près de 40 km, vierge de toute construction, des Saintes-Maries-de-la Mer jusqu’à l’embouchure du Rhône. Cette litanie pourrait se prolonger encore sans jamais parvenir à en faire un portrait complet. La Camargue s’avère bien plus complexe que ses images de cartes postales, tant sont étroites les imbrications entre représentations et réalité, paysages naturels et exploités, eau douce et eau salée.
Cette complexité a motivé depuis longtemps la protection de ses richesses écologiques et paysagères, dès 1927 avec la mise en place de la Réserve zoologique et botanique de l’étang de Vaccarès, puis dans les années 1970 avec la création d’un parc naturel régional, ou plus tard en 2012 avec la constitution d’une réserve naturelle nationale pour protéger les marais du Vigueirat. La Camargue reste un espace fragile. Pour maintenir son identité, la préservation de ses espaces naturels et de son patrimoine bâti (mas, bergeries, anciennes manades, cabanes de gardians, phares), l’encadrement des usages de loisirs et l’aide au maintien des activités agricoles traditionnelles restent nécessaires. Avec ses nombreux partenaires (collectivités, associations, fondations, établissements publics), le Conservatoire du littoral s’y emploie sur les 23 000 hectares qu’il protège.
« Une épave de poutre équarrie émerge de la boue sèche. Des rideaux de verne, d’osiers, d’aulnes et de buissons, multipliant leurs plis et des serpentements sans issue, serrent des flaques d’eau grise, des lacs d’eau bleue, des entonnoirs de vase noire, des plaques de boue sèche craquelée et racornie, de minuscules déserts d’un alfa d’ambre et empêchent les approfondissements de l’horizon…
Le fleuve est là ! Il est là ; on le voit à travers un grillage de roseaux et sa largeur est au-dessus des roseaux, dressée comme un mur, portant des îles et un terrible mélange de muscles d’argent. De l’autre côté des roseaux il est seul dans la magique et formidable trouée qu’il a déchirée à travers le ciel, la terre ; loin par-delà sa rive opposée, il a reculé de minuscules collines d’enfant. Ses bras nus sont couchés dans des verveines plus épaisses que la laine des moutons. Ses mains écrasent des écumes qui jaillissent en s’éclairant d’arcs de couleurs. »
Les contraintes naturelles ont limité le développement urbain en Camargue, dont la densité habitée reste aujourd’hui très peu élevée (2 habitants au km²). L’urbanisation s’est concentrée au nord, autour de la ville d’Arles, le long de la route départementale 113 vers Salon-de-Provence et, au sud-est, autour de Port-Saint-Louis sur la rive gauche du Rhône (aménagements portuaires et zones industrielles de Fos-sur-Mer). Pendant cette période, le Conservatoire du littoral a acquis environ 10 000 ha comprenant principalement les étangs de Vaccarès et de Vigueirat, et les salines de chaque côté de l’embouchure du Rhône. En tout, il protège aujourd’hui plus de 23 000 ha.
• Entre Petit Rhône et golfe de Fos, la Camargue est la plus vaste zone humide d’Europe
• Un des seuls véritables deltas français, deuxième en importance après le Nil parmi les 4 de la Méditerranée (Ebre et Pô)
• Des paysages marqués par l’horizontalité, l’infini des plages et de la mer, l’imbrication entre l’eau et la terre, les espaces naturels et cultivés
• Un espace mis en valeur depuis très longtemps par l’Homme
• Un littoral soumis à des risques importants de submersion marine
• Une représentation d’espace « sauvage » aux multiples usages
• Des activités de loisir difficiles à maîtriser (caravaning sauvage, cabanisation, etc.)
• Une agriculture traditionnelle (élevage extensif, manades) en recul au profit d’une exploitation plus intensive et plus rentable du sol (céréaliculture, riziculture et maraîchage), au risque d’une banalisation des paysages et des écosystèmes
• Un large panel de protections : 1 site classé au titre de la loi de 1930 (étang de Vaccarès), 17 espaces naturels protégés par le Conservatoire du littoral, un parc naturel régional (PNR de Camargue), deux réserves naturelles nationales, une réserve de biosphère, une Réserve naturelle régionale gérée par la Tour du Valat